Guillaume Oyono Mbia, la plume éternelle jusqu’à nouvel avis ! (Par Baltazar Atangana Noah)

[Tract] – Guillaume Oyono Mbia est mort le 10 avril 2021, à 82 ans. Né à Mvoutessi, il a fini universitaire et écrivain-dramaturge à l’œuvre remarquable.

 

Il a élaboré un monde théâtral atypique et considérable que plusieurs générations de chercheurs se sont attelées à construire, déconstruire et reconstruire. Il a su passer au crible de sa plume, humour et enseignement aidant, les us et coutumes des sociétés africaines. Ce, pour mieux donner forme à cette pensée de la transformation positive du monde, À la recherche de la beauté perdue. Son style en donne les traces Jusqu’à nouvel avis. Quel « bourbier littéraire » d’une originalité à faire jouir Trois prétendant un mari avec l’apaisement de nos origines.

Il avait, me semble-t-il, compris quelque chose de la vie: « Il faut savoir durer sur cette terre, c’est une chance parfois pénible. » comme disait Le vieux nègre et la médaille.

Guillaume Oyono Mbia, sans fausses notes ni mauvais accord, est l’un des écrivains majeurs ayant excellé dans le genre dramatique dans le domaine littéraire camerounais d’expression française. Il appartient à la génération d’écrivains, inspirés, passion et ingéniosité aidant, qui, tout juste après les soleils des indépendances, a, considérablement et remarquablement, fait bouger les lignes esthétiques et thématiques de l’espace culturel et littéraire camerounais encore naissant. C’est, d’ailleurs, pour cette raison que toute sa production se pose d’emblée comme une manière de bibliothèque-repère incontournable pour les jeunes générations.

Guillaume Oyono Mbia a réussi à créer une technique d’écriture théâtrale pertinente, transition de l’arbre à palabre au livre à palabres, travers laquelle il oppose tradition et modernité, colonisation et post-colonisation. Ce, en remettant, particulièrement, en cause la question de la place de la femme dans les sociétés africaines, notamment à travers la problématique de la dot dans les cultures Fang. Sa démarche n’envisage pas de diluer la teneur des cultures Fang. Elle suggère, au contraire, la mise en langue d’un discours socioculturel qui intègre la femme et l’homme à la fois, sous le préau de la complémentarité, comme marqueur de développement et d’émancipation de toutes les poches sociales, économiques, culturelles et politiques de nos sociétés.

Les jeunes dramaturges- conteurs, slameurs, performeurs et humoristes aussi-africains en général, et camerounais en particuliers, qui ont de plus en plus du mal à construire des écrits qui associent ludique et enseignement, gagneraient à élaborer leur processus créatif à partir du sien. Car, celui-ci déploie une esthétique parodique de la palabre littéraire, qui est une excellente ruse de l’écriture qui permet une critique sociale constructive.

Tout compte fait, Guillaume Oyono Mbia est un écrivain que nous devons lire encore aujourd’hui. Ses œuvres devraient servir comme fondation de l’introduction à l’écriture littéraire dans le module initiation à l’écriture théâtrale. Il a produit des faits littéraires qui nous invitent à nous pencher sur les méandres des problématiques existentielles et socioculturelles qui, bien qu’adoptant de nouvelles formes d’une époque à une autre, gardent le même fond: la dot, la polygamie, la rencontre de l’autre, la vie… la mort!

 

Baltazar Atangana Noah- Nkul Beti

Ecrivain, critique littéraire

Chercheur associé IMEC