Hommages à la légende Maradona dénoncés par des femmes

Alors que le footballeur est présenté comme un dieu, une courageuse joueuse espagnole refuse de lui rendre hommage et quelques voix rappellent son passé d’homme violent, écrit

Paula Dapena, une joueuse de la Division 3 Espagnole a refusé de respecter l’hommage à Diego Maradona lors d’un match amical au nom de la cause des femmes. Elle s’est assise et a tourné le dos aux gradins alors que ses coéquipières et adversaires se tenaient debout en ligne pour respecter une minute de silence.

Après le match, la joueuse espagnole explique : «j’ai dit que je ne ferai pas de minute de silence pour un violeur, pédophile, et agresseur, et que je m’assiérai dos aux tribunes. Avant d’être joueur, il faut d’abord être une personne et avoir des valeurs qui vont plus loin que les capacités qu’il avait, même si nous connaissons tous ses qualités et dons spectaculaires. » Un refus hautement politique de la part de la joueuse et un discours assez peu relayé dans les médias. Mais dans son titre , le Parisien dit que la joueuse « boude » l’hommage national… Tout un programme.

Dans un article du Guardian dénonçant les hommages au footballeur déchu et le silence total sur son palmarès de violences conjugales, Joan Smith commence ainsi : « Imaginez un homme en train de frapper sa compagne. L’image qui nous vient à l’esprit est probablement celle d’un individu débraillé, la main levée et le visage déformé par la colère. Nous pouvons tous condamner ça, n’est-ce pas ? Mais que faire si ce visage est familier, qu’il a été vu des milliers de fois dans un contexte très différent ? S’il est, par exemple, celui du footballeur le plus célèbre et le plus admiré au monde, Diego Maradona ? »

L’ironie du sort a voulu que le joueur argentin meure à la date de la journée internationale de lutte pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Il y a 6 ans, une chaine de télévision argentine diffusait pour la première fois une vidéo du joueur en train de frapper sa compagne de l’époque, Rocio Oliva, une ancienne joueuse de football professionnelle, de 30 ans sa cadette. Sur la vidéo, Maradona titube tout en lui hurlant dessus, et d’après les images, il la frappe à deux reprises. La «légende du football», comme on l’appelle, n’a pas contesté l’authenticité de la vidéo, en revanche il a nié l’avoir frappée. « Je jure devant Dieu que je n’ai jamais frappé une femme. » Le joueur a été accusé auparavant de maltraitance par son ex compagne. Le Guardian rappelle un incident s’étant produit dans un avion devant des dizaines de témoins : Maradona avait insulté Oliva avant de la saisir violemment par le cou.

Les bruyants hommages au footballeur montrent que la violence domestique est encore invisibilisée, surtout si l’auteur présumé est un sportif de haut niveau, ou un acteur célèbre. Sean Connery a lui aussi reçu des hommages appuyés il y a quelques semaines, alors même qu’il frappait sa première épouse, Diane Colento et s’en vantait.

Joan Smith conclut : « Il peut être douloureux pour les fans de champions sportifs et d’acteurs oscarisés d’admettre que leurs héros ont abusé des femmes. Mais la violence domestique est une épidémie, et elle ne s’arrêtera pas tant qu’elle sera gommée des sites de fans ou de leurs nécrologies. Nous avons tous une responsabilité dans ce domaine, et elle ne peut pas être ignorée en raison du talent de quelqu’un. »

Les partisans de «séparer l’homme de l’artiste»  font toujours beaucoup de bruit que les celles et ceux qui refusent les honneurs aux hommes violents. Ici c’est Paula Dapena qui est courageuse et paraît marginale, comme l’ont été les féministes qui protestaient par exemple contre les honneurs faits à Polanski ou à Cantat

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