La peur de nommer un Premier ministre d’opposition en 2022, vraie motivation de la suppression du poste

L’ET DIT TÔT – L’on a beaucoup épilogué sur la décision de Macky Sall, président réélu, de supprimer dans un futur proche le poste de Premier ministre. Comme l’avait fait le président Léopold Sédar Senghor entre 1963 et 1970 et le président Abdou Diouf entre 1983 et 1990. Le premier, Léopold Senghor, avait choisi cette solution pour mettre fin à la crise de régime provoquée par la dualité au sommet de l’État, qui donnait plus de pouvoir au président du Conseil Mamadou Dia qu’au président de la République. Quant à Abdou Diouf, il avait supprimé le poste de PM pour assoir son autorité et éliminer un alter ego qui avait pensé mériter autant que lui la succession de Senghor : Moustapha Niasse.

Sur les motivations de Macky Sall, on est obligé de tenter de les deviner. Mais une des pistes est le coup de semonce qu’il a reçu en 2017 aux législatives, où sa coalition a recueilli moins de la moitié des suffrages, plus exactement 49%. La coalition présidentielle Benno  Bokk Yaakar ne soit son écrasante majorité parlementaire actuelle qu’à la dispersion des voix de l’opposition en 2017. Or, la présidentielle de 2019 a révélé une forte dynamique unitaire de cet opposition. Les candidats Idrissa Seck et Ousmane Sonko se sont retrouvés à plusieurs reprises pour faire barrage aux résultats proclamant Macky Sall vainqueur de la présidentielle. Ils ont été ensuite rejoint par les deux autres candidats de l’opposition à la présidentielle, Issa Sall du PUR et Madické Niang. Or cette opposition a fait 42% officiellement à la présidentielle; De là a atteindre la barre des 50% aux législatives de juillet 2022, il n »y a qu’un pas, que Macky Sall a vite fait de franchir dans ses réflexions. Il supprime donc le poste pour ne pas avoir à nommer un Premier ministre d’opposition en 2022 et à être forcé à une cohabitation qui le dépossèderait de toutes ses prérogatives de pouvoir. Des analystes disent qu’avec cette suppression du poste de Premier ministre, la motion de censure va disparaitre, de m^me que le pouvoir présidentiel de dissolution de l’Assemblée nationale. SI c’est vrai pour le premier (la moion de censure contre le Premier ministre n’existera plus), rien n’est moins sûr pour ce qui est du deuxième aspect : un Macky Sall sans Premier ministre pourrait tout à fait conserver le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale.

Voici ce qu’écrivait l’ancien ministre de la Culture e opposant Amadou Tidiane Wone, dans un post daté du 7 avril : Le Président Macky Sall, en supprimant le poste de Premier Ministre, n’anticipe t-il pas sur une défaite possible de son parti et de ses alliés lors des prochaines élections législatives? Il ferme ainsi la porte à l’éventualité d’une cohabitation en se donnant des pouvoirs suffisamment exorbitants pour contenir tous les assauts jusqu’à la fin de son mandat. En fait, il serait temps que l’opposition reconnaisse à Macky Sall des qualités de stratège et de tacticien au dessus de la normale. Nul ne peut venir à bout d’un adversaire qu’il ne respecte pas. Car il peut toujours vous surprendre. » Macky Sall aura en effet surpris tout son monde avec cette suppression du poste de premier ministre, qui se révèle être un coup de Jarnac contre l’opposition.

Damel Mor Macoumba Seck