[EXCLUSIF TRACT – Lens, 2003] Pape Bouba Diop : ma rencontre marquante avec le désormais mythique Lion

Il y a 17 ans… À un mois de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) qui va se tenir en Tunisie, le journal Frasques a mis dans l’avion Mamadou Diop alias Diop-le-maire (photographe), Mame Bara Nguirane et Cheikh Tidiane Coly. Leur destination: la France, l’Angleterre et l’Italie. Leur mission: rencontrer le maximun de Lions en Europe et se faire une idée de leur état d’esprit à quelques encablures de la CAN de Tunis 2004 (…) C’est à travers cette odyssée que nous avons rencontré l’homme du mythique but contre la France en Coupe du monde 2002.

Lens. Par une belle matinée de ce mercredi 17 décembre 2003. Il est 07h29 quand on arrive à la gare d’Arras (…)

Partis du Sud de France pour le Nord, nous venions de faire presque 12 heures de train. Nous nous étions endormis et nous voilà réveillés, avec quelques ankyloses par-ci, torticolis par là. Mais, ce n’est pas encore le repos pour nous, il faut reprendre un autre train, celui de 07h44, numéroté 46415.

Ah, en France, on aime bien les chiffres. Parce qu’ici, il faut bien le noter, tout marche par la précision et pour la précision. Et, pendant qu’on y est, nous arrivons à Lens à 08h01mn. Nos ventres crient famine. Mamadou Diop-le-maire traîne les pieds, à 50m derrière, pendant que Mame Bara Nguirane fait de longues foulées, et au milieu, votre serviteur joue les équilibristes…

Nous avons pris le premier bus pour nous rendre au centre de formation de Lens. Mais, nous descendons au mauvais arrêt. « Boromm laméñ du réér, même en France. Une charmante lycéenne nous indique le bon endroit. Mais, au cours du chemin, nous plongeons dans la première boutique d’alimentation en vue. C’est là que l’on trouve un gentil jeune homme qui nous amène, après nos achats, dans sa voiture pour nous déposer au centtre sportif du club de la région.


Nous n’avions pas besoin de parler au gardien. Une belle 4X4 Mercedes arrive devant le portail du centre. La vitre teintée baissée, Pape Bouba Diop. Souriant, il a toujours son regard tendre. Il nous a reconnu, c’est notre heure de chance… Un mot au gardien, et nous voilà engouffrés dans sa belle bagnole dont le chauffage fonctionne à merveille. « Vous venez d’arriver, on dirait », dit Pape Bouba en manœuvrant pour bien garer sa voiture.

Pape Bouba signe des autographes pour des supporters de Lens.

On chahute un peu sur tout, sur le froid qui règne en France, la chaleur au Sénégal (…)

On attend dans le splendide hall d’un bâtiment, ce qui nous a permis de manger un peu tout en buvant notre chocolat chaud. Cela réveille notre organisme qui était à un degré de geler.

Cheikh Tidiane Coly, Rigobert Song et Mame Bara Nguirane, en toute complicité, pendant que Pape Bouba Diop and Co s’échauffent déjà, derrière, sur le terrain. / Photo – Mamadou Diop-le-maire

Dix minutes plus tard, on vient nous chercher pour nous permettre de suivre les séances d’entrainement des lensois. On accroche le Camerounais Rigobert Song qui nous crie, en wolof, « na nga déf ? » en nous serrant les mains. Nous en profitons pour « causer » pendant que déjà sur le terrain, Pape Sarr, Pape Bouba Diop and Co courraient derrière le ballon (…)

Rigobert Song, capitaine des Lions indomptables du Cameroun mais aussi capitaine de Lens, bouteille d’eau minérale à la main gantée est en forme pour papoter avec les « amis, invités de Lens ».

Rigobert Song et Pape Bouba, très en forme, après les séances d’entraînement.

Le champion d’Afrique, taquin révélé, nous parle du peuple sénégalais « formidable », de Pape Diouf, « un père » pour lui, de ses footballeurs, de ses coéquipiers de Lens, de Pape Bouba… « Mais oui, ce sont des joueurs qui démontrent qu’ils ont des qualités énormes. Bouba, on le connaît. C’est quelqu’un qui a un grand potentiel et peut rendre service dans n’importe quel club où il est appelé à jouer« , a t-il déclaré (…)

Il faisait tellement froid que nous sommes retournés, après notre entretien avec R. Song, dans le bâtiment pour y attendre les joueurs. Oui, nous ne sentions plus nos corps. Joloff, c’est bien loin d’ici. Nous sommes nés sous le soleil chaud, et nous préféront donc nous blottir dans un endroit où la température est plus clémente.

Le jeune Pape Ibrahima Ndiaye, Pape Bouba Diop et Pape Sarr arrivent dans le salon, après leurs séances d’entrainement, que nous n’avons pas pu suivre entièrement. Abdoulaye Diagne Faye est resté en salle pour des soins. Il avait quelques bobos.

 

Les discussions, si vous préférez les interviews commencent, à tour de rôle, et parfois, ensemble dans une atmosphère bon enfant. On se rappelle 2002, la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), la Coupe du monde, le but de Pape Bouba contre la France, l’Hystérie (avec un grand H) collective en Afrique et partout ailleurs, les poules et coqs « déplumés » aux quatre coins des continents… Une belle ambiance.

Mais, avec cette percée en 2002, Pape Bouba ne veut pas se la jouer star ou héros d’une nation ou d’un continent. Il a juste les « pieds sur terre », et il veut toujours les avoir là, au sol, sur le gazon. Il veut rester le même et, il l’est resté. C’est l’expression même de son visage d’ange et de son regard d’agneau contrastant avec sa carrure de gladiateur qui vous le révèle. Pape Bouba est resté le même (…) Et dans notre entre entretien, on s’est rappelé qu’il fêtera son anniversaire en pleine CAN à Tunis. Alors, il aura 26 ans le 28 janvier 2004 (Bouba est né le 28 janvier 1978 à Rufisque). Nous en profitons pour dérouler son cursus, sa carrière qui a commencé, pendant qu’il était tout jeune, dans l’équipe Espoir de Dakar avant de se retrouver dans celle du Diaraf où il côtoie son ami Henri Camara. Les ambitions se précisent, et voilà le jeune Rufisquois monnayer son talent au-delà des frontières du Sénégal, pour ne pas dire du continent africain.

Pape Bouba est d’abord appelé par la Suisse où il fait rouler le ballon, tour à tour pour Vevey Sport, Neuchâtel Xamax, Grasshoppers. Ensuite, il foule le sol de France. C’est le Racing club de Lens qui l’adopte en janvier 2002.

Champion de Suisse en 2001, le droitier des « Sang et Or » est, à la fois, vice-champion d’Afrique et de France en 2002… Ajoutons, pour célébrer encore son incroyable but contre les « Cocoricos de France » alors champion du monde, que Pape Bouba Diop quart-de-finaliste en Coupe du monde 2002. Depuis le début de la saison 2003/1004 en cours, l’ancien sociétaire du Diaraf a joué 12 matches avec son club (11 titulaires et 1 fois remplaçant). Il a reçu 4 avertissements au cours de la douzaine de rencontres et une expulsion (un carton rouge reçu au cours du match Lens/Metz joué le 04 octobre 2003).

Bouba Diop a marqué 1 but lors du match Lens/Marseille (3e journée), mais également 2 buts en coupe de l’UEFA… On a parlé de tout ça. Bref, on retiendra de cette « conversation » que ce jeune garçon, de bientôt 26 ans, haut de 1,94m pour 98kg, est un milieu de terrain dont la puissance redoutable est crainte par les équipes adverses, en France et ailleurs (…)   

                                                                                                                 

Il est midi passé de quelques minutes. Si nous voulons arriver à Montbéliard, à temps, pour suivre le match Sochaux/Marseille et, par la même occasion coincer Habib Bèye et Sylvain Ndiaye que nous n’avions pas pu rencontrer chez eux, à Marseille, il faut quitter Lens le plus vite possible. Il ne sous reste plus que quelques petites minutes pour ne pas rater le train. L’interview avec Abdoulaye Diagne Faye ? On n’essaiera de l’appeler…

Poignées de mains avec les lensois et, « au revoir ». Notre Tgv est pour 12h51. Nous n’avons plus qu’une dizaine de minutes. Pape Bouba Diop décide de nous conduire et nous invite à prendre place dans sa voiture, pour nous permettre d’être, pile à l’heure, à la gare. Nous nous donnons rendez-vous à Tunis, pour la CAN 2004.

Depuis lors, beaucoup de ballons ont roulé sur les gazons, des rencontres ont eu lieu, avec toi, Pape Bouba Diop, sur les « terrains de l’existence ». Et, depuis ce dimanche 29 novembre 2020, rappelé au Royaume Céleste, le destin a décidé qu’il n’y aura plus d’autres entrevues, avec ta personne, sur cette Terre qui a été heureuse de te voir naître, et où les Coqs chanteront toujours, à chaque aube d’une nouvelle vie, ton nom, PAPE BOUBA DIOP

Adieu, Gaïndé! Adieu, Champion! Adieu, Héros mythique!

 

Cheikh Tidiane COLY