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Meurtre de George Floyd : Aux Etats-Unis, les manifs s’amplifient, la répression policière aussi

Aux Etats-Unis, la colère s’amplifie, la répression policière aussi.Entre manifestations pacifiques, échauffourées et pillages, la contestation née de la mort de George Floyd continue de s’étendre. Près d’une douzaine d’Etats ont mobilisé les soldats de la Garde nationale.

Les couvre-feux imposés dans de nombreuses grandes villes américaines n’y ont rien changé. La colère qui s’est emparée du pays après la mort lundi de George Floyd, un homme noir tué à Minneapolis par un policier blanc, a continué samedi de s’étendre. Dans la plupart des métropoles des Etats-Unis, mais aussi dans de nombreuses petites villes, les manifestations pacifiques de l’après-midi ont cédé la place, en soirée, à des scènes de violence, des pillages et des affrontements avec les forces de l’ordre, déployées en nombre.

A Minneapolis, où George Floyd, 46 ans, est décédé après avoir été plaqué au sol par plusieurs agents, dont un, Derek Chauvin, inculpé vendredi d’homicide involontaire, a maintenu son genou sur son cou pendant plus de huit minutes, les autorités locales avaient annoncé leur intention de reprendre la main après deux jours d’émeutes. Elles ont tenu parole. Des policiers antiémeutes ont ainsi chargé, à grand renfort de gaz lacrymogène, spray au poivre et balles en caoutchouc, les manifestants qui défiaient le couvre-feu.

A Los Angeles, où un couvre-feu est entré en vigueur à 20 h samedi, la police de la ville avait décidé, fait extrêmement rare, de déployer sur le terrain l’intégralité de ses agents, afin d’afficher une présence policière la plus forte possible. Plusieurs véhicules de police ont été incendiés, cinq policiers blessés et plusieurs centaines de personnes arrêtés lorsqu’une manifestation pacifique a dégénéré. Des commerces ont été incendiés et pillés, notamment dans les magasins de luxe de Beverly Hills. Dans la soirée, le maire démocrate de Los Angeles a demandé au gouverneur de déployer 700 membres de la Garde nationale.

Coktail molotov

Au total, les gouverneurs de près d’une douzaine d’Etats, dont la Californie, le Missouri, le Nevada, le Texas, l’Ohio ou la Géorgie, ont pris la décision d’activer la Garde nationale, en soutien des forces de police locales. Celui du Minnesota, le démocrate Tim Walz, a même annoncé, une première, la mobilisation de l’ensemble des 13 000 soldats de la Garde nationale de son État.

A New York, des échauffourées ont éclaté dans plusieurs quartiers de la ville, à Brooklyn mais aussi au cœur de Manhattan, près de Times Square et Union Square, où une voiture de police a été incendiée. Au total, plus d’une vingtaine de véhicules du NYPD sont partis en fumée. Un cocktail molotov a été lancé par une jeune femme de 27 ans à l’intérieur d’une voiture de patrouille, sans faire de victimes parmi les quatre policiers qui l’occupaient. Au moins 200 personnes ont été interpellées.

Impunité

De Philadelphie à Atlanta, de San Antonio à Miami, de Chicago à Philadelphie, les mêmes scènes se sont répétées. Les mêmes appels à la «Justice pour George Floyd» et à la fin des brutalités policières ont été lancés. Et pourtant, comme un symbole de ces forces de police gangrenées par des pratiques violentes et un profond sentiment d’impunité, de multiples témoignages et vidéos, souvent filmées en direct par la presse, ont mis en exergue ces comportements abusifs. Comme ce jeune couple noir tasé et sorti de force de son véhicule à Atlanta, ce jeune manifestant aspergé de spray au poivre au visage à New York alors qu’il avait les mains levées, ces résidents de Minneapolis, assis sur les escaliers de leur maison et ciblés délibérément par la police, ou encore, à Salt Lake City, ce vieil homme avec une canne poussé à terre par deux policiers à coups de boucliers en plastique.

À New York, la vidéo de deux voitures de police passant en force dans une petite foule de manifestants, projetant violemment certains d’entre eux au sol, a suscité de vives réactions. Elle montre un premier véhicule bloqué par une barrière métallique placée sur la chaussée par des protestataires, qui se tiennent derrière. Certains jettent des objets sur la voiture, rapidement rejointe par un second véhicule du NYPD, dont le conducteur fonce dans la foule, aussitôt imité par son collègue.

Yashar Ali 🐘

@yashar

It’s hard to remain peaceful when the NYPD is doing stuff like this

Vidéo intégrée

Le maire démocrate de la ville, Bill de Blasio, a indiqué que l’incident faisait l’objet d’une enquête. «J’aurais préféré que les officiers trouvent une approche différente»a-t-il déclaré, tout en refusant de «blâmer les officiers qui essayaient de faire face à une situation impossible» et «intenable» créée, a estimé de Blasio, par les manifestants «qui ont fait le mauvais choix».

Nation divisée

Face à la colère qui s’étend, y compris jusqu’aux grilles de la Maison Blanche, protégées par un imposant dispositif de sécurité, Donald Trump a promis de «stopper la violence collective». Dans un discours prononcé depuis le centre spatial Kennedy de Cap Canaveral, où il venait d’assister au lancement historique du premier vol habité SpaceX, le président américain est revenu sur la mort de George Floyd, «une grave tragédie»qui «n’aurait jamais dû se produire». Tout en disant «comprendre» la colère, Trump a dénoncé avec force les violences, les «pilleurs et les anarchistes», rejetant la responsabilité des émeutes sur les «Antifa» et «d’autres groupes de la gauche radicale qui terrorisent les innocents, détruisent les emplois, nuisent aux entreprises et brûlent des bâtiments».

Dans le camp républicain et ultra-conservateur, des voix s’élèvent pour suggérer à Donald Trump de s’adresser rapidement à la nation. Une nation profondément divisée, et où la «plaie béante» du racisme, évoquée vendredi par Joe Biden, et attisée depuis des années par l’actuel locataire de la Maison Blanche, a été rouverte à vif par la mort de George Floyd. Pour l’ancien vice-président de Barack Obama, l’équation posée par les événements de la semaine écoulée est politiquement complexe. Très populaire au sein de la communauté noire, il n’a d’autre choix que d’incarner et relayer sa colère légitime, sans pour autant donner l’impression de cautionner les violences. «Manifester contre une telle brutalité est un droit et une nécessité […] mais mettre le feu à des villes et la destruction gratuite ne l’est pas», a-t-il déclaré dimanche dans un communiqué.

«Oppression silencieuse»

Deux réactions emblématiques illustrent toutefois le défi qui attend Joe Biden, désireux d’incarner, dans un pays polarisé comme jamais, une ligne réconciliatrice lors de la présidentielle de novembre. Celle, d’abord, de la porte-parole de la campagne de Donald Trump, Katrina Pierson, dans un tweetextrêmement virulent et «binaire» : «L’ennemi est parmi nous, et il n’est pas invisible. Vous devez choisir en novembre qui VOUS voulez aux commandes de votre communauté. Le choix est binaire. Sécurité ou Anarchie. Votez comme si votre vie en dépend, parce que c’est le cas!».

Tract (Avec Libé)