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Sanctions « Y en a marre » : les justifications du ministère de l’Intérieur

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Les autorités sénégalaises enquêtent sur les financements de Y en a marre et de plusieurs de ses partenaires depuis près de six mois. « Le ministère de l’Intérieur avait relevé des manquements aux réglementations en vigueur », précise à Jeune Afrique le ministre Aly Ngouille Ndiaye. C’est dans ce contexte qu’une « vérification administrative » a été ouverte en juin, laquelle, toujours selon le ministre, a « révélé une violation des règles relatives aux financements des associations impliquant l’association sénégalaise Y en a marre, l’association étrangère Lead Afrique francophone et les ONG Oxfam et Osiwa ».

Oxfam International et Open Society Initiative for West Africa (Osiwa) ont mis en œuvre des programmes avec Y en a marre en 2013 et 2014. Quant à l’association Lead Afrique francophone, elle assurait la gestion financière et administrative du mouvement citoyen. Mais le 5 novembre, son autorisation a été abrogée par le ministère de l’Intérieur suite à cette enquête, entraînant la cessation de ses activités sur le territoire sénégalais.

Accusé par Y en a marre de vouloir liquider le mouvement pour des raisons politiques, à quelques mois de la présidentielle, Aly Ngouille Ndiaye insiste sur le fait que ses services ont travaillé « dans le cadre de leurs attributions de suivi et de tuteurs des ONG et des associations ».

Enda mis en demeure, Lead sanctionné

C’est dans ce cadre que le responsable administratif et financier d’Osiwa a été convoqué par la police, mardi 13 novembre, au même titre que le directeur financier de Lead Afrique Francophone, qui n’a appris l’abrogation de son autorisation que trois jours plus tard, suite à une convocation des autorités. « Vous étiez au courant avant nous », confie à Jeune Afrique Moussa Mbaye Gueye, le directeur général de Lead Afrique francophone, visiblement sonné, à la sortie de sa convocation.

L’association Enda, dont dépend Lead, a également reçu une mise en demeure du ministère de l’Intérieur, l’invitant à « présenter des observations écrites [sur le rôle de relais financier de Lead au profit du mouvement Y en a Marre] dans un délai d’un mois au maximum ».

Le document, cacheté à la date du 6 novembre, a donc été transmis un jour après la perte d’autorisation de Lead. Une chronologie qui pose question, mais sur laquelle le ministère de l’Intérieur dément toute anomalie, bien que les liens entre l’association Lead et l’ONG Enda soient explicitement cités dans le document.

« La mise en demeure de Enda n’a rien à voir avec Lead », affirme Ibrahima Sakho, le directeur général de l’Administration territoriale – qui dépend du ministère de l’Intérieur. « Associations et ONG ne sont pas régies par les mêmes règles. Et si la loi prévoit une mise en demeure en tant que préalable pour inviter les ONG à s’expliquer sur les faits qui leur sont reprochés, ce n’est pas le cas pour les associations, qui peuvent être l’objet de sanctions immédiates », ajoute le haut fonctionnaire

L’utilité publique de Y en a marre remise en question

Face aux défenseurs de l’association Y en a marre, qui crient au musellement anti-démocratique contre ce mouvement citoyen emblématique, fondé en 2011, le ministère de l’Intérieur pointe des « financements irréguliers » qui auraient été reconnus par les responsables de Lead. Le ministère affirme également que Y en a marre, n’étant pasreconnu d’utilité publique, n’a pas le droit de bénéficier de legs, dons ou subventions d’organisations extérieures, selon le Code des obligations Civiles et Commerciales (COCC).

De fait, si le COCC stipule que les associations reconnues d’utilité publique peuvent « bénéficier de subventions publiques et être autorisées à recevoir des dons et legs de toute personne », le texte est moins précis concernant les autres associations. Celles-ci peuvent, « même lorsqu’elles ne sont pas reconnues d’utilité publique, recevoir des subventions de l’État ou des autres collectivités publiques », selon le texte. « Mais pas de libéralités extérieures ! » insiste Ibrahima Sakho.

« Ce n’est pas du tout ce que prévoit la loi », s’insurge un cadre de Lead Afrique francophone, qui préfère conserver l’anonymat. Il estime pour sa part que rien n’empêche l’association de recourir à des financement extérieurs de quelque entité que ce soit. « Combien d’associations au Sénégal reçoivent des subventions de l’Union européenne, de l’USAID ou d’ONG comme Oxfam ? », s’interroge-t-il.

Un combat politique ?

Au-delà de la seule question légale, le gouvernement de Macky Sall, comme celui de son prédécesseur Abdoulaye Wade, en 2012, dénonce l’engagement politique d’associations comme Y en a marre ou, encore récemment, Amnesty International – accusée par le chef de l’État d’avoir partie liée avec l’opposition.

« Nous ne sommes ni du côté du pouvoir ni de celui de l’opposition, rétorque un dirigeant de Y en a marre. Mais nous tenons à notre rôle de sentinelles de la démocratie. » Emmanuel Padonou, avocat d’affaires et spécialiste des ONG, estime quant à lui que « Y en a Marre a le droit de recevoir des financements extérieurs », mais il souligne également que « l’État a un droit de regard sur ceux-ci et peut « taper » sur les bailleurs dès lors qu’il considère que ces fonds financent des activités politiques. La question est de savoir si Y en a Marre mène un combat politique ou seulement citoyen ».

JA

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