[ÉDITO, ET DIT TÔT] Ouestaf : retour (gagnant?) des « gouvernements de majorité présidentielle élargie » (Par Ousseynou Nar Gueye)

Burkina, Sénégal, Côte d’Ivoire : le retour des »gouvernements de majorité présidentielle élargie « .

Au Sénégal, le 1er novembre 2020, le président Sall a fait de la place dans l’appareil d’État à ses opposants de la présidentielle de février 2019 : le parti Rewmi d’Idrissa Seck est entré au gouvernement (deux ministres), avec en crise sur le gâteau, l’octroi du poste de président du Conseil économique, social et environnemental pour le président du parti Orange, Idrissa Seck. Dans la foulée, l’ex coordonnateur du PDS (principal parti d’opposition parlementaire), Oumar Sarr, qui a désormais son « daara » politique et dont le PDS n’avait pas pu avoir un candidat à la présidentielle pour laquelle Abdoulaye Wade a appelé au boycott, Oumar Sarr donc, est aussi préempté dans le gouvernement.

C’est le retour des gouvernements de majorités présidentielle élargie en Affrique de l’Ouest, pour donner les coudées franches au (dernier?) mandat des présidents reconduits dans leur fauteuil. En effet, Alassane Ouattara a fait de même en Côte d’Ivoire : il a nommé ministre de la Réconciliation Kouadio Konan Bertin, plus connu sous son acronyme KKB et qui a été le seul à affronter activement Ouattara dans la présidentielle du 31 octobre. Transfuge du parti historique le PDCI, KKB a certainement dans sa feuille de route le rapprochement entre Ouattara et l’aile dure de l’opposition notamment incarnée par le dinosaure octogénaire Henri Konan Bedié (60 ans de vie aux avants- poste politique) et le patron de l’aile légale du FPI Affi Nguessan, ex Premier ministre de Gbagbo avec les affidés desquels il a opéré un rapprochement (FPI GOR – Gbagbo ou rien) en direction des législatives de mars prochain.

Au Burkina, où la scène politique est plus apaisée, le président réélu Roch Kaboré vient de nommer ministre son challenger arrivé troisième lors de la dernière présidentielle de novembre : Zéphirin Diabré. Kaboré zappe ainsi le deuxième de la présidentielle, Eddy Komboïgo dont le parti CDP qui est celui du président renversé par la rue Blaise Compaoré sent encore trop le souffre. Kaboré adoube Diabré dans son statut de principale figure morale de l’opposition (bien que désormais rallié à la majorité présidentielle?)

Après la tentation à laquelle ils ont souvent succombé de choisir et d’imposer leur successeur, les présidents ouest-africains retombent dans la propension très années 90 post-conférences nationales : penser que leurs opposants sont plus utiles proches d’eux qu’au loin. Et décider en conséquence.

Si la paix sociale est sort renforcée (pour un temps?), la démocratie n’en est pas forcément rendu plus solide. Et ceux des opposants qui ne rallient pas le pouvoir en place peuvent être tentés par une radicalisation accrue.

Ousseynou Nar Gueye

Éditorialiste, fondateur du site d’information Tract.sn