Arrêter « l’arrêté Ousmane Ngom » : ultimatum de 03 mois de la CEDEAO au Sénégal

L’Etat du Sénégal a essuyé hier, jeudi 31 mars, un deuxième revers devant la Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), quelques mois après le rejet du parrainage.

En effet, dans son délibéré sur le recours déposé par la Ligue sénégalaise des droits de l’homme (Lsdh) et la section sénégalaise de Amnesty international contre l’« Arrêté Ousmane Ngom », cette juridiction sous régionale donne au Sénégal un «délai de trois mois pour faire un rapport sur l’état d’exécution de la mesure».

Si l’équipe nationale de football du Sénégal enchaine ces derniers jours les belles performances sous le ciel africain, tel n’est pas le cas pour le régime en place qui vient d’essuyer une nouvelle déconvenue devant la Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Moins de six mois après la décision rendue par cette juridiction sous-régionale contre le parrainage citoyen, l’Etat du Sénégal a subi un nouveau revers. Saisie d’un recours déposé par la Ligue sénégalaise des droits de l’homme (Lsdh) et la section sénégalaise de Amnesty international contre l’arrêté n°007580/ Mint/Sp communément appelé «Arrêté Ousmane Ngom» du nom de l’ancien ministre de l’Intérieur du Sénégal, l’institution juridique sous-régionale a rendu hier, jeudi 31 mars son verdict. Et selon nos confrères du site Emedia qui ont relayé l’information, la Cour de justice de la Cedeao a tranché en faveur de ces deux organisations de défense des droits de l’homme en déclarant que « l’arrêté Ousmane Ngom» « violait la liberté de manifestation, entre autres ».

Loin de s’en tenir là, nos confrères ont également indiqué que cette haute juridiction sous régionale qui a rejeté dans la foulée la demande de «condamner l’État du Sénégal à leur payer la somme de 500.000.000 de nos francs en guise de réparation » formulée par les deux organisations de défense des droits de l’homme dans leur plainte, a imparti à l’Etat du Sénégal un « délai de trois mois pour faire un rapport sur l’état d’exécution de la mesure».

Pour rappel, pris par l’ancien ministre de l’Intérieur du Sénégal sous le régime libéral du président Abdoulaye Wade à l’époque où le pays faisait face à une série de manifestations contre les coupures d’électricité et contre la troisième candidature de l’ancien chef de l’Etat, l’arrêté n°007580/ Mint/ Sp interdit toutes manifestations dans l’espace compris entre l’avenue Malick Sy et le Cap Manuel ainsi qu’aux abords immédiats du Monument de la Renaissance et devant les hôpitaux. Vigoureusement dénoncé à l’époque par les opposants d’alors, cet arrêté sera maintenant cependant maintenu après la deuxième alternance qui a propulsé au pouvoir le président Macky Sall et ses anciens collègues de l’opposition.

REACTIONS… REACTIONS…

SEYDi GASSAMA, DIRECTEUR EXECUTIF DE LA SECTION D’AMNESTY INTERNATIONAL SENEGAL : «Nous espérons que cette décision… sera res-pectée par l’Etat contre lequel elle est rendue»
Nous sommes très contents et dès que nous aurons la décision, nous allons tenir une conférence de presse conjointe (la Ligue sénégalaise des droits de l’homme et Amnesty). Nous espérons que cette décision qui est une grande conquête en matière de droits humains et des libertés publiques sera respectée par l’Etat contre lequel elle est rendue. Nous n’avons aucun doute que l’Etat du Sénégal va respecter surtout que les manifestations dans cette zone interdite ont toujours lieu sans problème.

MAYORO FAYE, SECRETAIRE NATIONAL CHARGE A LA COMMUNICATION DU PDS :«Il est temps que l’Etat du Sénégal respecte sa signature»
Il est temps que l’Etat du Sénégal respecte sa signature et les traités internationaux et conventions qu’il a ratifiés. C’est une énième décision venant d’une institution régionale ou internationale. Je pense que pour ne pas davantage ternir l’image du Sénégal, l’Etat devrait respecter les décisions rendues pas les cours et tribunaux internationaux. On ne peut continuer à être dans l’impunité et le forcing contre les décisions des institutions internationales notamment concernant le respect des droits de l’homme en ce qui concerne Karim Wade, la question liée au parrainage avec cette même Cour de justice de la Cedeao qui a encore tranché contre l’arrêté Ousmane Ngom qui, à mon avis devait être caduque puisqu’il avait été pris par rapport à un contexte bien donné et ledit contexte n’est plus le même. Une démocratie si elle n’avance pas recule.

MOUSSA SARR, PORTE-PAROLE DE LA LIGUE DEMOCRATIQUE : «Nous voulons que l’Etat du Sénégal respecte la démocratie, respecte les libertés individuelles et collectives. Mais…»
La première chose que j’ai à dire par rapport à cette décision, c’est que nous ne pouvons que prendre acte de cet arrêté rendu par la Cour de justice de la Cedeao. Ensuite, il nous faut quand même rappeler que nous sommes dans un pays de démocratie, de liberté et les formes de libertés que nous avons dans ce pays ont été conquises de haute lutte. Nous voulons que l’Etat du Sénégal respecte la démocratie, respecte les libertés individuelles et collectives. Ça, c’est un fait, nous nous sommes toujours battus dans ce pays pour le respect des libertés. Mais, il faut également constater qu’il n’est pas tolérable que les acteurs politiques et les organisations de la société civile puissent manifester partout dans la capitale, y compris devant les grilles du Palais de la République. Partout où vous allez dans le monde, il y a des lieux qui sont interdits aux manifestations. Il y a des manifestations qui ne sont pas tolérées sur les Champs-Élysées, il en est de même devant la Maison blanche aux États-Unis. Il faut également au Sénégal accepter qu’il y a des lieux dans lesquels nous ne devons pas nous autoriser des manifestations. Je pense que les grilles du Palais de la République devraient être soustraites des lieux de manifestations politiques et syndicales. Nous devons protéger nos institutions et cela n’empêchera pas que la démocratie continue à se développer dans ce pays.