« Ceci n’est pas le Jeanne d’Arc de ma jeunesse ! » (Aïssatou Sow, alumni ISJA)

Du temps où elle était directrice exécutive de Digital Links : rencontre avec des investisseurs à York (England)

Cri du coeur d’une ancienne de l’institution sainte Jeanne d’Arc:

« J’ai été dans cette école que je considère comme l’une des meilleures au Sénégal, aux côtés des mes amies sénégalaises, africaines et d’une communauté libanaise amie, chrétienne, musulmane, voilée ou non. La force et la beauté de notre éducation qui nous a forgées vient de l’ouverture d’esprit que nous avons pratiquée dès les plus jeune âge, opposant et embrassant nos différences dans la plus grande convivialité, dans le plus grand respect et dans la plus grande amitié. Moi musulmane j’ai appris et intégré les prières catholiques avant mes repas ou avant le début de la classe. Ca ne m’empêchait pas de murmurer ma bismillah. C’est avec fierté que je clame mon éducation à JA, avec mère Paule qui ne se gênait pas pour tirer sur les jupes trop courtes ou essayer les rouges à lèvres de celles qui osaient. Mes copines musulmanes voilées faisaient le sport avec nous et on allait au cours de morale pendant que les autres faisaient catéchisme même si le prof de morale n’était qu’un prêtre déguisé. Mais qu’importe. On en riait. Les valeurs morales de la chrétienté ou de l’islam sont universelles.

Je suis ce que je suis aujourd’hui grâce à cette ouverture d’esprit pratiquée d’abord à la maison avec une éducation ancrée dans l’Islam, une bibliothèque garnie ou je retrouvais la Bible et les écrits sur les évangiles et le judaïsme, et une école aux côtés des sœurs catholiques qui montraient l’exemple de l’abnégation, de la tolérance et pour certaines, de la gentillesse par essence.


Aujourd’hui JA fait un amalgame dangereux entre le port du voile pour celles qui l’ont choisi et le comportement de certaines qui veulent s’auto-exclure dans une attitude fermée et une philosophie qui clashe avec l’essence de l’islam (ne pas faire de sport, ne pas serrer la main à un garçon, ne pas s’asseoir à côté d’un garçon et vice-versa).


JA doit faire preuve de mesure et de fermeté devant ces attitudes comme le faisaient mère Paule devant nos blouses mal fermées et devant les jeunes qui de temps en temps fumaient en cachette dans la cour arrière. Mais assimiler ces comportement au port du voile est tout simplement un signe que l’école catholique se fait le reflet des politiques limitatives de droit pratiquées dans certains pays comme la France.


Laissez les jeunes filles musulmanes porter leurs voiles si elles le désirent et ouvrez le dialogue au lieu de fermer la porte. Nous sommes dans un pays libre. J’espère en tant qu’Alumni de Jeanne d’Arc que cette décision ne sera pas entérinée. J’espère que les jeunes filles de toute confession s’uniront devant cette attitude décevante et feront bloc un jour, toutes voilées aux côtés des sœurs catholiques, pour vous montrer qu’il suffit de peu pour créer la paix et l’entente, mais qu’il en faudra beaucoup plus pour faire perdurer la discorde que vous venez de faire naître. » »

Aissatou Sow
Institution Sainte Jeanne d’Arc
1984-1988