Demandes régulières de réparations pour la Traite Négrière : pas un seul franc versé, par voie judiciaire

Sentract – En 2021, le Centre international de recherches sur les esclavages et post-esclavages avait réuni 14 chercheurs du monde entier pour répertorier les tentatives de réparations matérielles et financières mises en place depuis la fin de l’esclavage.

Lundi à Accra, lors d’un sommet consacré aux conséquences de l’esclavage, puis mardi dans des messages sur Twitter, le président ghanéen Nana Akufo-Addo a plaidé pour que de réparations soient versées au continent africain. « Il est temps que l’Afrique, dont 20 millions de fils et de filles ont vu leurs libertés réduites et ont été vendus comme esclaves, reçoive également des réparations », a notamment écrit le chef de l’État. S’il estime qu’aucune somme d’argent ne pourra réparer les dommages de la traite négrière, Nana Akufo-Addo considère que c’est à l’Union Africaine de se mobiliser, indique Rfi.

La question des réparations n’est pas nouvelle, elle s’est posée en même temps que celle des abolitions de l’esclavage. Ainsi, en 1865, aux États-Unis, juste après l’abolition, un ordre militaire prévoit la confiscation de 1 600 km2 de terres le long de la côte atlantique. Chaque esclave affranchi doit recevoir 16 hectares. Une forte opposition des élites blanches bloque le processus. Toujours aux États-Unis, la banque JP Morgan dont le capital est en partie issu de l’esclavage, doit, suite au vote d’une loi en 2005, financer des bourses pour les étudiants noirs de la ville de Chicago. Au Royaume-Uni, des universités proposent également des aides aux étudiants originaires des Caraïbes.

Pas un centime par voie judiciaire

En Jamaïque, depuis 2009, une commission est mise en place, elle interroge sur les moyens d’apporter des réparations : transferts de compétence pour faciliter le développement, annulation de la dette. Pour le moment, les demandes de l’État n’ont rien donné. En Colombie, autre stratégie, les communautés noires n’exigent pas d’argent, mais défendent l’accès aux terres et à l’éducation.

En France, la loi Taubira adoptée en 2001 reconnaît l’esclavage comme un crime contre l’humanité, mais toutes les demandes formelles de réparations n’ont pas été conservées dans le texte adopté à l’Assemblée nationale. Les plaintes déposées, par exemple en 2013 par le Cran, le Conseil représentatif des associations noires de France, contre l’État et la Caisse des dépôts, accusée de complicité de crime contre l’humanité, n’ont pas abouti. Partout dans le monde, les mouvements qui se battent pour des réparations n’ont d’ailleurs jamais obtenu un seul centime d’un État par la voie judiciaire.

Pour l’historienne Giulia Bonacci, chargée de recherche à l’Institut de recherche pour le développement, le débat sur les réparations liées à l’esclavage est bien évidemment politique.

Ce qui est nouveau, c’est de voir un président en exercice poser clairement les termes du débat et inviter à la discussion.