[HUMANITAIRE] Sophie Chavanel: «Redonner au suivant pour la bonne cause»

Tract – Aujourd’hui, l’engagement des femmes dans l’humanitaire est remarquable. Leur action sur le terrain dans un contexte mondial frappé par de nombreuses formes d’insécurités généralisées encourage d’autres femmes à s’engager pour la bonne cause. Pour un partage d’expérience, nous nous sommes entretenus avec Sophie Chavanel ; en service au Congo Kinshasa, elle est cheffe de la communication pour le développement et changement social au Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF). Ancienne journaliste et porte-parole pour la Croix-Rouge, elle promeut une communication positive pour renforcer la défense des droits des plus vulnérables et les plus marginalisés partout où son travail la conduit

 

Avez-vous l’impression que votre engagement dans l’humanitaire encourage d’autres femmes et des jeunes filles à s’engager ?

Je l’espère bien. Inspirée par des femmes dans d’autres domaines telle que la gouvernance. Les femmes ont joué un rôle de mentor tout au long de ma carrière. Je considère que j’ai de la chance d’avoir un travail qui me permet de redonner au suivant ce qu’on m’a donné. On a cru en moi, on m’a donné ma chance. Je crois donc que la plus modeste chose à faire est de pouvoir également donner aux autres une chance, notamment les femmes et les jeunes filles. En République Démocratique du Congo, les jeunes filles et les femmes ont un talent et un potentiel immenses, mais elles n’ont pas toujours des opportunités.

D’un pays à l’autre, crise après crise ; d’une mission à une autre, vous êtes sur tous les fronts. Et la famille dans tout cela ?

On est loin de la famille; presque déracinés. Mais, on essaie d’entretenir les relations avec la famille, les parents notamment qui se font vieux. Pour ma part, je suis maman d’une fille de 11 ans. Je vis avec elle ici, en RDC. J’avoue que ce n’est pas toujours facile, mais ce sont des sacrifices que nous faisons. Je pense d’ailleurs que mon travail contribue à l’éducation de ma fille, en attirant son attention sur l’importance de faire quelque chose de bien autour de soi, compte tenu des enjeux sociaux. Il est vrai qu’aujourd’hui, elle est occupée par l’école, mais avant cela je l’ai toujours exposée aux programmes de l’UNICEF en l’amenant sur le terrain avec moi. Car, il était important pour elle de voir comment les gens sont résilients face aux difficultés de la vie.

Dans des pays comme le Congo Kinshasa où vous travaillez actuellement, le risque n’est pas que sanitaire. Il est aussi sécuritaire. Comment naviguez-vous au milieu de toutes ces contraintes ?

Ici, à l’Est du Congo Kinshasa, la situation sécuritaire est préoccupante, surtout pour les jeunes filles qui subissent des violences atroces, notamment les abus sexuels. Avec plus de 6 millions de déplacés, dont les femmes et les enfants sont en majorité, plusieurs filles se retrouvent sans revenus et même sans repères. Le mandat de l’UNICEF nous permet de créer des couloirs humanitaires pour accéder aux zones les plus complexes en prenant toutes les mesures sécuritaires possibles. Il est également important de noter qu’il y a d’autres formes d’insécurités en RDC, notamment les catastrophes naturelles, et même les accidents de la route qui sont pléthoriques et causés par le mauvais état des routes et des véhicules.

Qu’est-ce qui vous permet de garder la flamme de votre engagement humanitaire ?

C’est plus une vocation plus qu’autre chose et j’y suis arrivée par hasard, Chez-moi, tout a commencé en 2010, après le tremblement de terre en Haïti, lorsque la Croix-Rouge m’a fait la proposition. J’ai trouvé ce travail passionnant car il me permettait de donner une voix à ceux qui n’en ont pas toujours. Puis j’ai souhaité changer cette communication négative que plusieurs organisations avaient tendance à avoir par rapport à ce qui se passait dans les pays dits en voie de développement. Pourtant, ça n’est parfait nul part. Chaque pays a ses côtés positifs et négatifs. Je suis également consciente de la chance que j’ai de travailler en parcourant le monde, à la rencontre et à la découverte d’autres cultures, tout en prenant plaisir de communiquer positivement: même lorsque c’est dur, encourager les gens que mon travail me permet de rencontrer à se relever et à tenir.

 

Propos recueillis par Baltazar ATANGANA/ Correspondant(Afrique Centrale)