[ Tribune] Malade imaginaire ou « imaginatif » : Quand Macky Sall guérira-t-il du coronavirus ? (Par Babacar « Beuz » Diédhiou, Lyon)

« La bêtise insiste toujours » disait Albert Camus. Le président sénégalais persiste encore dans son tâtonnement et dans ses injonctions, en imitant le confinement des pays gravement touchés, avec : un couvre-feu inapproprié, une interdiction arbitraire des déplacements entre régions, une fermeture incompréhensible des marchés à partir de 17h, une demande honteuse d’annulation de la dette criée sur tous les toits, une distribution ostentatoire et politicienne de minables sacs de riz, et dans la continuité, une mesure d’ouverture de seulement 3 jours des commerces qui font de l’alimentaire, de 2 jours pour les autres commerces, et la fermeture pour le week-end. Quelle est la dimension scientifique de ces décisions, répondent-elles au rythme et à la vitesse de la propagation du virus ? Non !Le virus ne circule pas seulement la nuit, ni tous les 2 jours ou 3 jours !

Le président sénégalais guérira-t-il du coronavirus ? Quand arrêtera-t-il cette démarche bidon ? Qui lui fera comprendre que ce n’est pas la bonne voie ? D’autres épidémies, ressemblant fortement au Coronavirus, voire plus graves, frappent le Sénégal !

Quand comprendra-t-il que la famine tuera plus que le coronavirus ? Que dans ce pays la malnutrition tue déjà plus que lui, et qu’il fera encore plus de dégât avec ses fameux sacs de riz comme seul aliment distribué aux confinés du soir ? Sait-il qu’en 2015, le Sénégal a enregistré 265 624 cas et 500 décès dus au paludisme, dont 175 étaient des enfants ? Que la malnutrition serait l’une des principales causes de la mortalité infanto-juvénile dans ce pays, avec 54% en 2014 ? Que la mortalité s’établit à 392 pour 100 000 naissances vivantes ? A-t-il oublié que le Sénégal enregistre 1500 nouveaux cas de cancer du sein et 1000 du col de l’utérus, chaque année, selon la Ligue sénégalaise de lutte contre le Cancer ? Est-il au courant que la grippe saisonnière tue plus de personnes que le coronavirus ? Et que sévissent encore dans ce pays des maladies plus contagieuses que le coronavirus, comme la rougeole et la variole ? Et pour tous ces cas il n’y a pas tout ce brouhaha !

En deux mois le Sénégal compte seulement 1182 cas déclarés positifs au coronavirus, dont 327 guéris, seulement 9 décès, 1 évacué, et 800 patients sous traitement. A ce rythme la situation est très gérable, et montre que si les gouvernants sont impuissants à faire face à la vague de malades, ce n’est pas le cas des professionnels de la santé, même s’ils essaient toujours de leur voler la vedette. Que les hôpitaux débordés, à certains endroits du pays ne le sont pas du fait du coronavirus, mais d’une mauvaise politique sanitaire qui dure depuis des années, et dont le président lui-même a fait l’aveu dans un article publié tout récemment.

Le coronavirus n’est pas d’une contagiosité « extrême » en Afrique…

Ce n’est pas pour minimiser ce qui se passe actuellement, mais il faut qu’il sache que le Covid-19 finalement, n’est pas d’une contagiosité extrême comme le relaient les médias, avec leur fameuse expression « cas communautaire », qui ne veut rien dire dans l’absolu et ne sert qu’à entretenir la peur ! Il faut qu’il se rende compte que l’augmentation des cas est la dynamique habituelle de toutes les pandémies ! Elle devient de plus en plus sévère avec une accélération, un pic puis une diminution, pour des raisons que l’on ne comprend pas totalement. Parlons de cette immunité collective, pour laquelle le président devait faire le choix de laisser sa population jeune circuler et affronter le virus pour créer des anticorps ! Faut-il rappeler au président que les personnes âgées de plus de 60 ans ne sont qu’au nombre de 838 541 seulement, soit 3,6o% de la population alors qu’en France les 65 ans et plus, représentent 18,8 % de la population ? Juste pour dire qu’il était plus plausible, plus raisonnable, plus intelligent, de confiner ou de trouver une bonne stratégie de barrière pour ces personnes vulnérables, que de priver les 14 millions restant de leurs droits d’aller et venir ! De les priver d’éducation, d’accès à la culture, au divertissement, à toutes les activités d’épanouissement, par la peur, la violence, l’intimidation, et la désinformation ! Il faut dire aussi qu’avec ces mesures il oublie et renforce les difficultés de la vie quotidienne qu’éprouvent les personnes les plus précaires et les plus fragiles… Macky en profite pour bafouer les libertés et les droits, comme l’histoire nous l’a souvent montré : en période de crise, la restriction des droits augmente. Dans les circonstances que nous vivons, les personnes enfermées, isolées, celles qui vivent à la rue, qui ont besoin d’aide sociale pour une partie de leurs besoins fondamentaux subissent une double peine. Il faut apprendre à Macky Sall que les épidémies ont toujours existé et existeront toujours, que les virus font partie de nous et de la nature !

Toutes ces mesures qu’il essaie de vendre aux médias occidentaux ne changeront pas grand-chose. Après RFI et France 24, le président de la République du Sénégal, Macky Sall a à nouveau accordé une interview à un organe de la presse hexagonal. Cette fois, le Chef de l’Etat, a choisi la presse écrite, le Figaro (journal de droite) pour y annoncer un éventuel « confinement général », si l’évolution de la situation le requiert. Le confinement est une mesure incontournable pour endiguer la propagation de la maladie selon lui ! Sa stratégie de réponse face à cette « crise » n’est pas bonne ! Doit-on d’ailleurs parler de crise au Sénégal avec un seuil de mortalité si bas ?

Le régime politique ayant raté l’entrée dans la crise sanitaire, trébuchant sur la manière de s’y prendre, se lance à présent dans un demi-confinement hasardeux. C’est vraiment une gestion chaotique d’un des épisodes qui n’est pourtant pas l’un des plus dangereux de l’histoire de notre pays. Nous avons connu des pandémies plus graves et plus mortelles, comme le choléra, le paludisme, Ebola… et il n’y avait pas toute cette panique, et cette peur véhiculées.

On s’en fiche de la dette !

Il va falloir qu’il arrête de penser à la dette et de faire du Sénégal « un pays clochard », qui attend que les autres le tirent d’affaire. Après 2 mois de crise sanitaire, de retour sur expérience, le président et ses acolytes n’arrivent toujours pas à avoir leur propre méthode ! Pourtant la situation est bien moins dramatique qu’ailleurs ! Avec notre expérience remarquable pour le paludisme, le sénégalais devrait être un guide, un aiguilleur, un exemple dans cette crise mondiale.

Malheureusement, c’est l’inverse qui se produit ! On suit encore ! Et on attend l’aide au développement ! Pourtant ce n’est vraiment pas le moment de se préoccuper d’une dette que personne ne payera, que personne n’a jamais payée ! Ses économistes doivent interroger l’histoire !

Les conséquences économiques graves et de ses décisions hasardeuses et impréparées.
Cette comédie officielle aurait-t-elle pour sens de l’aider à mesurer les conséquences économiques de ses décisions hasardeuses et impréparées ? Soit c’est de l’ignorance et c’est dommage, soit il fait exprès, et c’est encore pire ! Le président fait mal ! C’est vrai que le mal parfois vient de l’ignorance. S’il pense que c’est de la bonne volonté, celle-ci n’est pas bien éclairée, et il risque de faire beaucoup de dégâts…

La situation dans laquelle il met les Sénégalais n’est pas tenable. Et un éventuel confinement n’est pas possible dans un pays où le système social n’est pas au point, où plus de la moitié de la population vit dans l’informel, avec des boulots précaires et non déclarés ! Nous n’allons pas continuer à distribuer des sacs de riz comme au Moyen-âge… Un vrai tam-tam trompeur ! La population commence à sombrer dans la misère la plus absolue, et les gens sont privés de toute leur humanité, le contact, la discussion, la sociabilité ! Le couvre-feu est inutile, il est d’une brutalité inouïe avec ses semailles d’angoisse, de morts amplifiées par des médias bizarroïdes. « L’état nous pisse dessus et les médias nous disent qu’il pleut » !

Le président se rend-il compte que les ventes au détail ont déjà chuté, que les magasins de vêtements et accessoires observent impuissamment leurs ventes chuter de moitié ! Tout le monde sait que le travail à distance ou la vente en ligne n’est pas possible. Les restaurants et bars souffraient déjà, et beaucoup vont devoir fermer leurs portes, dans un pays où le cumul du chômage et de l’emploi précaire dépasse le taux de 70% de la population active.

Les Sénégalais vont payer très cher les conséquences de la pandémie de Covid-19, à cause d’une mauvaise gestion de celle-ci. Alors que se succèdent les chiffres vertigineux de la chute de l’activité et des revenus des personnes et des entreprises, on commence déjà à découvrir l’ampleur du désastre économique provoqué dans le pays par un gouvernement amateur. La consommation, moteur de la croissance a calé. Les habitants sont progressivement appelés à ne pas sortir de chez eux pour enrayer la propagation du virus ! Comment vont-ils faire pour vivre ? Comment les jeunes élèves et écoliers vont-ils rattraper le retard ? Y aura-t-il des sessions de rattrapage ! Y a-t-il une préparation pour l’après-crise ? Allons-nous profiter de la situation pour changer de cap ? Pourtant c’est maintenant que l’on doit commencer à y penser !

Les épidémies ont toujours existé et existeront probablement toujours.

Cette crise a apporté une preuve du chaos du monde, de l’impuissance des politiques occidentales, et une occasion pour nous de relocaliser, de nationaliser, de réinventer une autre économie, de prendre une nouvelle direction, de parler d’autosuffisance alimentaire et d’autonomie ! La solidarité des Sénégalais face à la crise, a montré notre capacité à réussir d’autres aventures ! Au lieu de saisir l’occasion pour réinventer notre système démocratique, le président en profite pour priver les gens de leur liberté et pour s’octroyer des pouvoirs en plus. Il ne sait pas que sans démocratie, le marché ne peut fonctionner efficacement : il ne peut seul assurer ni le respect de la règle de droit, ni la stabilité de l’environnement économique et social, conditions de l’investissement. C’est la faiblesse de la démocratie qui provoque la déflation dans laquelle nous sommes en train de plonger, en refusant de la voir.

Les politiques et les médias ont réussi à faire gober à la population que la santé est plus importante que tout, à créer une panique générale, une peur, une angoisse maladive et infernale ! Il faut comprendre que si notre économie n’est pas solide, nous ne pouvons pas avoir un système de santé efficace ! Avec cette pandémie mondiale, il faut bien sûr se protéger, il faut faire des tests, mais il faut de l’intelligence et de la résilience, et continuer de vivre, car ni le monde ni la vie ne se sont arrêtés.

Babacar Beuz Diedhiou
Journaliste / communicant, Lyon

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