CAMEROUN : POUR UNE OPÉRATIONALISATION DURABLE DE L’APPROCHE « ONE HEALTH/UNE SEULE SANTÉ » EN FAVEUR DES AIRES PROTÉGÉES

Mefou National Park /Crédit photo: Parc de la Mefou.1

SENtract – L’initiative One Health/Une seule santé, mouvement créé au début des années 2000, est une approche globale fondée sur le postulat qu’il existe une interaction entre la santé humaine, celle des animaux et le milieu naturel ; que l’amélioration du bien-être et de la santé humaine passent par celle de la santé animale, la protection des écosystèmes et de leur biodiversité. 

 

L’histoire du monde est émaillée de nombreuses crises sanitaires d’origine animale, notamment ; la peste, la grippe aviaire (H1N1, H5N1), le paludisme, la dengue, le chikungunya, le west nile virus, la fièvre de la Vallée du Rift, ébola, et dernière en date, la covid-19. Les zoonoses ont de graves conséquences sur la santé humaine, animale, environnementale et ont un impact négatif sur le développement global.

Le mouvement One Health/Une seule santé mène des actions à travers le monde, en synergie avec les pouvoirs publics des pays concernés, les ONG, des organes de financement, d’appui technique et logistique tels que le FEM, AID, DGIS, la coopération allemande (GIZ), le fond mondial pour la nature (WWF), FAO, OMS, OIE, UNICEF, Banque Mondiale, etc. L’une des solutions préconisées pour la préservation de la biodiversité et des équilibres naturels propices à un développement économique et humain durable, qui profitera aussi aux générations futures, est l’aménagement des aires ou zones protégées. Ces dernières sont des espaces à l’accès limité, visant à préserver au maximum les espèces humaines, animales et végétales qui y vivent. Les aires protégées sont également des facteurs de développement locaux, de promotion et de conservation des valeurs culturelles.

Le Cameroun est souvent appelé « l’Afrique en miniature », car il présente des écosystèmes diversifiés, notamment la forêt au Sud, à l’est et au sud-ouest, une zone de savane tropicale au centre dans la région de l’Adamaoua et semi-sahélienne dans l’extrême-Nord du pays. Plusieurs zones protégées ont été créées, notamment le Jardin Botanique de Limbé pendant la période coloniale en 1885, suivi aujourd’hui d’une trentaine de parcs nationaux et de réserves fauniques dont les principaux sont : Bouba Ndjida, de la Benoué, Mbam et Djerem, Mozogo, Campo Maan, Korup, Lobéké, Boumba Bet, Deng Deng, le sanctuaire à gorilles de Mengame, sanctuaire de faune de Tofala Hill, réserve de biosphère de Waza ou du Dja, etc. Les aires protégées sont placées sous la responsabilité conjointe du Ministère de la Forêt et de la Faune (MINFOF), du Ministère de la Santé Publique, du Ministère de l’Agriculture de Pêches et des Industries Animales (MINEPIA), du Ministère en charge de l’environnement. Leur gestion est en proie de nombreuses difficultés qui plombent leur efficacité et les exposent à une dégradation progressive.

PROBLMES LIÉS A LA GESTION DES AIRES PROTEGÉES AU CAMEROUN

Le principal problème découle des conséquences de la pression démographique, avec l’empiètement des activités humaines (agriculture élevage et habitat sur les zones préservées, accentuant ainsi leur destruction. De fait, l’exploitation abusive des ressources animales et ligneuses et halieutiques s’appauvrissent progressivement. Et entraînent, par ricochet, des désordres climatiques.

Par ailleurs, on remarque de sérieux problèmes socio-culturels liés a l’inadaptation des solutions préconisées qui se traduisent par des frustrations des populations riveraines, des conflits entre les divers acteurs sur le terrain. Par exemple, les affrontements incessants entre éleveurs et agriculteurs, la méfiance vis-à-vis des pouvoirs publics et les ONG. À titre illustration, en 2016, l’ONG Survival International a porté plainte contre WWF pour violation des droits des pygmées dans les parcs nationaux de Lobéké, Boumba Bet et Nki. L’on peut également souligner l’expulsion des autochtones de leurs zones, sans recasement comme lors de l’établissement du parc national de Korup en 1986.

La difficulté pour les villageois de mener une activité génératrice de revenus en plus de celle de la préservation des écosystèmes qui sont souvent opposées. A ce titre il leur est difficile de combattre le braconnage qui est leur source de nourriture, de préserver les plantes et les forêts, leur source de bois de chauffe, de matériaux pour l’habitat et les plantes médicinales.

En définitive, l’impact catastrophique des crises sanitaires à base de zoonoses telles que la pandémie de la covid-19 dans les domaines de l’économie, de l’environnement, de la santé humaine, animale et végétale montre à souhait l’importance de leur prévention en amont par l’aménagement des aires protégées par exemple, de leur suivi et de leur prise en charge thérapeutique en aval. La solution aux problèmes des aires protégées passe par le renforcement de la coopération des initiatives intégrées telles que One Health, avec tous les autres acteurs de la promotion de la santé humaine, animale et environnementale que sont les pouvoirs publics, les ONG et autres appuis techniques et financiers de ce secteur. Et ce, afin d’envisager un décloisonnement des disciplines et des enseignements dans une approche collaborative, multisectorielle et transdisciplinaire, entre toutes les parties dont les centres d’intérêts sont la conservation de la biodiversité dans les aires protégées en favorisant ainsi une approche interdépendante, unifiée et interconnectée entre les personnes, les animaux et l’environnement pour une meilleure conservation de la biodiversité dans le réseau des aires protégées camerounaises.

 

Baltazar Atangana Noah,

Écrivain camerounais,

(noahatango@yahoo.ca )